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Deux peuples pour un État

 

La création d’un État binational où Israéliens et Palestiniens seraient citoyens du même État a jadis été l’aspiration de nombreux intellectuels juifs critiques, de gauche comme de droite. Les prises de position en faveur du binationalisme, d’Ahad Haam dès la fin du XIXe siècle à Léon Magnes en passant par Hannah Arendt et beaucoup d’autres, pour qui le désir de créer un État juif exclusif sur une terre peuplée en majorité par des Arabes entraînerait un conflit violent et insoluble, se sont révélées tout à fait exactes. Avec l’arrivée aux affaires de l’extrême droite en Israël, les massacres perpétrés par le Hamas et les bombardements de la bande de Gaza, la question d’un État binational est devenue une urgence pour toute la région. Lui tourner le dos n’y changera rien.

Le binationalisme ne relève pas seulement du vœu pieux, mais aussi de la réalité présente : 7,5 millions d’Israéliens-juifs dominent, par une politique d’expulsion, de dépla­cement, de répression et d’enfermement, un peuple palestinien-arabe de 7,5 millions de personnes, dont une grande partie est privée de droits civiques et des libertés politiques élémentaires. Il est évident qu’une telle situa­tion ne pourra pas durer éternellement.

Shlomo Sand est un historien israélien, professeur émérite à l’université de Tel-Aviv, et auteur de nombreux livres, dont certains ont suscité de vifs débats.

Shlomo SAND, Deux peuples pour un État ? – Relire l’histoire du sionisme, Seuil, 2024 [Partage en ligne].

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Dix mythes sur Israël

 

1. Au XIXe siècle, avant l’arrivée des Juifs européens, la Palestine n’était pas une terre aride non cultivée.
2. Ces immigrants juifs n’étaient que très partiellement des descendants des Hébreux de l’époque romaine.
3. Sionisme et judaïsme ne sont pas des notions équivalentes. Tous les Juifs, et notamment les orthodoxes, ne sont pas sionistes.
4. Le sionisme est bien une forme de colonialisme.
5. L’exode des Palestiniens pendant la guerre de 1948 fut principalement causé par les exactions israéliennes.
6. La guerre de 1967 fut largement anticipée, voire souhaitée, par les dirigeants israéliens.
7. L’État juif qui impose une forme d’apartheid aux Palestiniens n’est pas démocratique.
8. Le pseudo-“processus de paix” engagé à Oslo en 1993 ne pouvait pas aboutir.
9. La résistance du Hamas à Gaza n’est pas condamnable en elle-même ?
10. Le mythe auquel Pappé fait un sort concerne la fausse solution, dite à 2 États, dont il démontre l’impossibilité et la malhonnêteté.

Ilan PAPPÉ, Dix mythes sur Israël, 2017 réédition Les dix légendes structurantes d’Israël, Les Nuits Rouges, 2022 [Partage en ligne].

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Juifs et Palestiniens, nous n’avons pas le choix, nous devrons vivre ensemble

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Longtemps tenant d’une solution à deux États, Shlomo Sand explique que le réel l’a persuadé que seule une fédération ou une confédération était désormais viable.

Deux peuples pour un État ? Relire l’histoire du sionisme a été écrit avant le 7 octobre. Mais, indique Shlomo Sand à Middle East Eye, il n’aurait “pas changé une ligne théorique” s’il l’avait publié après.

“Peut-être aurais-je précisé que le 7 octobre est une confirmation de mes craintes. Nous ne pouvons qu’aller vers une organisation politique des deux peuples en fédération ou confédération. Sinon, ce sera toujours plus de catastrophes pareilles au 7 octobre et ses conséquences à Gaza. Mais avant d’arriver à ce compromis historique entre les deux peuples, nous connaîtrons d’autres catastrophes qui rendront cette solution politique indispensable.”

Dans son pessimisme volontariste, l’historien israélien, qui se réclame du réel et refuse toute utopie, reste persuadé que juifs et Palestiniens sont “condamnés à vivre ensemble, sinon ils disparaîtront ensemble”. “Je ne pense pas qu’un État juif seul puisse survivre au Moyen-Orient. Pas plus qu’un État palestinien d’ailleurs”, estime-t-il.

Une fois posé ce constat de la nécessité d’un État binational, Shlomo Sand en appelle… au sionisme. Mais pas n’importe lequel. Car, et c’est l’une des forces de cet essai paru aux éditions du Seuil en janvier dernier, l’historien plonge dans les textes oubliés de certains penseurs du sionisme. Ceux-là même qui ont très vite pensé un État binational pour les juifs et les Arabes en Palestine ottomane puis mandataire, alors même que l’idée d’un foyer national juif émergeait dans une Europe gagnée par le droit à l’autodétermination des peuples.

Le sionisme a créé une forme de “cercle mythologique”, selon l’expression de Sand, qui a généré une linéarité historique, depuis une dispersion des juifs relatée par la Bible à un “retour” en “Eretz Yisrael” (Terre d’Israël). Mais Shlomo Sand fait œuvre d’historien et sort de ce cercle univoque, en considérant le sionisme comme un objet théorique et pluriel.

Une idéologie européanocentrée

Certes, détaille Shlomo Sand dans son essai, c’est le sionisme de son fondateur Theodor Herzl et celui des dirigeants de l’État d’Israël tout juste créé qui s’est très vite imposé. “Ce sont eux qui ont façonné Israël, dans un rapport de force avec le monde arabe”, explique-t-il à Middle East Eye. Un sionisme très imprégné par l’orientalisme européen.

Le sionisme de Herzl ou encore de Vladimir Jabontinsky, théoricien de la droite sioniste nationaliste, qui a gagné la bataille idéologique en Israël, était profondément imprégné d’une vision européenne de l’État-nation : dimension raciale, quête de la majorité démographique, imprégnation du colonialisme européen, orientalisme.

Herzl pensait le futur État juif comme une avancée occidentale dans la Palestine ottomane. Jabotinsky niait tout assentiment des indigènes de Palestine à une présence juive et célébrait la force. Et le Premier ministre David Ben Gourion avait l’obsession d’une majorité juive pour le tout jeune État israélien. Tous trois ont largement façonné l’Israël moderne.

De même, ils ont très vite affirmé un refus acharné d’établir une structure politique reposant sur le principe démocratique “un homme, une voix” qui risquerait d’handicaper la colonisation juive.

Ce livre montre également comment le sionisme a été très influencé par un antisémitisme chrétien persistant. Shlomo Sand écrit ainsi que cette idée de propriété “naturelle” sur la Palestine avait reçu un accueil très favorable dans le monde occidental chrétien, notamment car elle portait la promesse d’une réduction de la présence des juifs en Europe.

Les pères oubliés d’un autre sionisme

Mais en travaillant à cet ouvrage, l’historien indique avoir été étonné de découvrir d’autres courants du sionisme qui ont pensé et réclamé un État binational. “Ils refusaient l’idée d’un État juif exclusif, parce qu’ils connaissaient la Palestine ottomane ou mandataire, pour y avoir vécu.” Ces tenants d’un État binational étaient à la fois idéalistes et pragmatiques, indique-t-il à MEE.

Les noms d’Ahad Haam (nom de plume signifiant “un du peuple” ), Bertrand Lazare, Gershom Scholem, Martin Buber, Albert Einstein, Hannah Arendt, Avraham B. Yehoshua, Uri Avnery, pour les plus connus, viennent émailler l’ouvrage. Essayiste, religieux, écrivain, philosophe, ils ont tous tenté de penser un État binational.

La plupart restent connus en Israël comme les penseurs d’un sionisme dit “spirituel”, profondément innervé par l’éthique et la religion juives. Une grande partie des pacifistes étaient religieux, contrairement aux athées Herzl, Jabotinsky ou Ben Gourion.

Leurs écrits dédiés à l’État binational sont peu connus, explique Sand à MEE : “Leurs théories consacrées aux indigènes arabes ont été occultées pour ne conserver que ceux où ils liaient le sionisme aux textes religieux du judaïsme.”

Pour ces autres penseurs sionistes, attachés à un État binational, la Palestine mandataire était un lieu sémite et non occidental. Ils avaient observé une terre peuplée, contrairement au slogan de Herzl “une terre sans peuple pour un peuple sans terre”. Ils se sentaient eux-mêmes profondément sémites et voyaient dans le “retour” en Palestine un moyen de retrouver leur orientalité perdue.

“Étonnamment, ces penseurs qui militaient pour un État binational voyaient aussi dans le peuple juif un peuple-race. Et c’est précisément pour cela qu’ils pensaient qu’on pouvait se rapprocher des Arabes, car c’était la même race sémite. Pour eux, le peuple juif était sémite et devait vivre avec les Arabes, dans l’espoir d’une race sémite à nouveau unifiée”, explique Sand à MEE.

Ces pacifistes “sémites” étaient sûrs de trouver de nombreux points de convergence, spirituelle et biologique, avec l’Orient et les Arabes, note ainsi Sand dans son ouvrage. Et contrairement à Herzl par exemple, certains d’entre eux avaient très vite rejeté la déclaration Balfour, qui avait garanti la création d’un “foyer juif” en terre ottomane, y décelant une démonstration de force impérialiste.

Pour certains d’entre eux, les habitants de la Palestine figuraient même les descendants des Judéens islamisés après les conquêtes arabes.

Dans le détail, Shlomo Sand consacre des pages minutieuses à ces penseurs d’un binationalisme sémite. Il évoque ainsi Ahad Haam, qui avait adhéré au sionisme dans les années 1880. Ahad Haam s’était rendu en Palestine ottomane, y avait vécu et appris l’arabe.

On découvre aussi le groupe Brit Shalom (“association pour la paix”), créé en 1925, qui se voulait porteur d’une éthique consistant à vivre dans le pays avec les habitants, sans désir de les remplacer. Parmi ses membres, Martin Buber, Judah Leon Magnes ou encore Albert Einstein, qui ont pensé un État pour deux nations, avec une parfaite égalité des droits, indépendamment de toute question de supériorité démographique. Dans cet État binational, les lieux saints auraient été en situation d’extraterritorialité et il n’y avait pas de place pour une religion d’État.

D’autres encore traversent cet essai riche et passionnant : le mouvement de l’Ihoud (“unité” ), fondé en 1942 par Leon Magnes ou Martin Buber, ou encore l’Action sémite, fondé par Uri Avnery en 1956. Ce dernier plaidera pour le “cananéisme”, ou l’idée d’une une nation fondée ni sur l’hébraïté ni sur l’arabité, mais sur leur coexistence binationale.

Quant à Avraham B. Yehoshua, il verra dans l’“être israélien” la première expression de l’autodétermination de l’homme juif. L’écrivain israélien pensait ainsi une citoyenneté découplée de la religion.

Un pessimisme volontaire

L’essai de Sand dit aussi l’évolution d’un historien et d’un Israélien. Longtemps tenant d’une solution à deux États, le réel, dit-il, l’a persuadé que seule une fédération ou une confédération était désormais viable.

Shlomo Sand se veut pragmatique. “J’ai commencé à lire [ces auteurs] car je commençais à être désespéré par les slogans creux israéliens ou internationaux, comme ‘’la solution à deux États’’, qui ne correspondent en rien à la réalité du terrain”, indique-t-il à MEE.

Autre sentiment qui l’a traversé, une lassitude devant la “pièce tragicomique” qu’a été un processus de paix jamais abouti. Un hiatus, dit-il, entre des discours politiques creux et abstraits et une réalité effective d’un État déjà binational.

Il fait ainsi le lien entre les analyses d’Arendt, qui avait estimé qu’un État juif exclusif connaîtrait une guerre tous les dix ans, et sa vie de tous les jours à Tel Aviv : “Je vois bien que l’État israélien, tel qu’il se définit comme un État juif, ne survivra pas”, affirmera-t-il plusieurs fois.

La plongée dans ses souvenirs de jeune soldat, démobilisé en 1967, en pleine euphorie de la conquête de Jérusalem, traverse aussi le livre et l’entretien avec MEE. “Dès 67, j’ai réclamé un État palestinien à côté d’un État israélien. J’avais failli mourir lors de cette guerre. À Jérusalem, j’avais rejoint ceux qui critiquaient le gouvernement israélien. Puis je me suis tourné vers la gauche radicale car j’étais persuadé qu’il n’y avait pas d’avenir avec l’occupation.”

À rebours de l’ivresse messianiste et nationaliste qui a saisi Israël, le droit à l’autodétermination pour les deux peuples constitués entre la mer Méditerranée et le Jourdain, à l’occasion d’un processus douloureux et violent, lui a servi de “ligne de conduite”, écrit-il.

Mais depuis, la Cisjordanie est occupée par plus de 875 000 colons. Quatre ministres du gouvernement actuel et un chef d’état-major y vivent même. “Nous sommes de facto dans un État binational”, martèle Sand. “Nous sommes désormais tellement imbriqués l’un à l’autre, de façon irréversible, qu’au fond, je me dis que l’occupation née de 1967 a dévoilé celle qui aurait pu arriver en 1948, s’il n’y avait pas eu l’expulsion de 700 000 Palestiniens.”

Côté palestinien, toute une partie de la population vit sous un régime qu’il qualifie d’apartheid. “La mobilisation publique pour défendre la démocratie israélienne n’a aucunement mentionné le fait que depuis 56 ans, plusieurs millions de Palestiniens vivent sous un régime militaire et sont privés de droits civiques, juridiques et politiques”, écrit-il. Une situation intenable, affirme-t-il à MEE.

De plus, l’Autorité palestinienne ne dispose pas de soutien populaire, estime-t-il, notant qu’il n’y a pas eu d’élections en Cisjordanie ou à Gaza depuis des années. En outre, l’Autorité palestinienne dépend politiquement, socialement, économiquement d’Israël.

“J’en suis donc arrivé à la conclusion qu’il fallait transformer une situation de facto en situation de jure. Le plus important dans un État binational de jure est l’égalité des droits. Un homme ou une femme égale une voix”, détaille-t-il pour MEE.

Outre le principe d’égalité, Shlomo Sand plaide aussi pour doter les communautés de droits assurant le respect du principe d’égalité. Chacune doit pouvoir être en mesure de garder ses spécificités religieuses, culturelles, linguistiques.

Et c’est du côté de modèles effectifs, tels la Suisse, la Belgique ou encore le Canada, que regarde l’historien. Des “démocraties de concordance” dans lesquelles les droits des individus sont reconnus, mais également où des droits collectifs seront attribués aux différentes communautés linguistiques.

“Évidemment, penser tout cela après le 7 octobre est encore plus compliqué. Mais la haine n’apporte rien. Tous les conflits ont eu une fin. Nous n’avons pas le choix. Nous pouvons vivre avec les Palestiniens car, de fait, nous vivons déjà avec eux”, assure-t-il. La seule chose qui pourrait faire obstacle à cette idée, nuance-t-il toutefois, est ce qu’il nomme “la symbiose entre le nationalisme et la religion”.

Si ce phénomène ne date pas du 7 octobre et s’observe aussi bien en Israël que du côté des Palestiniens, il menace l’hypothèse d’un État binational.

L’opinion israélienne l’inquiète aussi. “Le mot d’ordre est la sécurité avant tout. Puis les Israéliens ne connaissent pas les Palestiniens, ce qui n’est pas vrai dans l’autre sens. Les Israéliens ne parlent pas l’arabe, alors que les Palestiniens apprennent généralement l’hébreu.”

Le pessimisme volontaire de Sand nomme aussi deux peurs : “Le 7 octobre a contribué à la montée de l’antisémitisme. J’ai aussi écrit cet essai pour empêcher les gens de devenir antisémites.” L’autre peur est une nouvelle expulsion des Palestiniens : “Ce qui s’est passé en 48 peut être refait”, écrit-il aussi, comme pour conjurer cette hypothèse.

Shlomo Sand : “Juifs et Palestiniens, nous n’avons pas le choix, nous devrons vivre ensemble”, Middle East Eye, 12/04/2024.

Lire aussi :
Shlomo SAND, Deux peuples pour un État ? – Relire l’histoire du sionisme, 2024 [Partage en ligne].
État unique Palestine-Israël, Monde en Question.
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La “solution” à deux États n’est pas du tout une solution

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Après 176 jours, l’assaut israélien sur Gaza n’a pas cessé et s’est étendu à ce que Human Rights Watch a déclaré être une politique de famine comme arme de guerre. Plus de 32 000 Palestiniens ont été tués et la communauté internationale est revenue à un appel bien connu en faveur d’une solution à deux États, dans le cadre de laquelle les Palestiniens et les Israéliens pourraient coexister dans la paix et la sécurité. Le président Biden a même déclaré que “la seule vraie solution est une solution à deux États” dans son discours sur l’état de l’Union le mois dernier.

Mais l’appel sonne creux. Le langage qui entoure une solution à deux États a perdu tout sens. Au fil des années, j’ai rencontré de nombreux diplomates occidentaux qui, en privé, roulaient des yeux devant la perspective de deux États – compte tenu de la ferme opposition d’Israël à ce projet, du manque d’intérêt de l’Occident à exercer suffisamment de pression sur Israël pour qu’il change de comportement et des politiques palestiniennes. ossification – alors même que leurs politiciens répètent l’expression ad nauseam. Pourtant, à l’ombre de ce qui, selon la Cour internationale de Justice, pourrait vraisemblablement être un génocide, tout le monde est revenu au rang du chœur, soulignant que la gravité de la situation signifie que cette fois-ci sera différente.

Ça ne sera pas. Répéter le mantra de la solution à deux États a permis aux décideurs politiques d’éviter de se confronter à la réalité selon laquelle la partition est irréalisable dans le cas d’Israël et de la Palestine, et illégitime en tant qu’arrangement initialement imposé aux Palestiniens sans leur consentement en 1947. Et fondamentalement, le concept des deux La solution interétatique a évolué pour devenir un pilier central du maintien de l’asservissement palestinien et de l’impunité israélienne. L’idée de deux États comme voie vers la justice a en soi normalisé la violence quotidienne infligée aux Palestiniens par le régime d’apartheid israélien.

Les circonstances auxquelles étaient confrontés les Palestiniens avant le 7 octobre 2023 illustrent à quel point le statu quo était devenu mortel. En 2022, les violences israéliennes ont tué au moins 34 enfants palestiniens en Cisjordanie, soit le plus grand nombre depuis 15 ans, et à la mi-2023, ce taux était en passe de dépasser ces niveaux. Pourtant, l’administration Biden a jugé bon de légitimer davantage Israël, en élargissant ses relations diplomatiques dans la région et en le récompensant par une dispense de visa américaine. La Palestine était largement absente de l’agenda international jusqu’à l’assassinat des Juifs israéliens le 7 octobre. Le fait qu’Israël et ses alliés étaient mal préparés à toute sorte de défi à la domination israélienne souligne à quel point les Palestiniens étaient invisibles et à quel point leur oppression était considérée comme durable. être sur la scène mondiale.

Ce moment de rupture historique offre une preuve sanglante que les politiques menées jusqu’à présent ont échoué, mais que les pays cherchent quand même à les ressusciter. Au lieu de prendre des mesures démontrant un véritable engagement en faveur de la paix – comme faire pression de manière significative sur Israël pour qu’il mette fin à la construction de colonies et lève le blocus de Gaza ou qu’il mette fin au soutien militaire expansif de l’Amérique – Washington fait le contraire. Les États-Unis ont utilisé de manière agressive leur veto au Conseil de sécurité des Nations Unies, et même lorsqu’ils s’abstiennent, comme ils l’ont fait lors du récent vote menant à la première résolution de cessez-le-feu depuis le 7 octobre, ils prétendent que de telles résolutions sont sans engagement. Les États-Unis financent l’armée israélienne tout en supprimant le financement de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies, une institution essentielle pour les Palestiniens, en renforçant l’Autorité palestinienne profondément impopulaire et illégitime, que de nombreux Palestiniens considèrent désormais comme un sous-traitant de l’occupation, et en renversant le droit international en limitant les voies de responsabilisation pour Israël. En fait, ces actions garantissent l’impunité israélienne.

La vacuité du mantra de la solution à deux États est particulièrement évidente dans la fréquence à laquelle les décideurs politiques parlent de reconnaître un État palestinien sans discuter de la fin de l’occupation du territoire palestinien par Israël. Bien au contraire : alors que les États-Unis envisagent apparemment des initiatives visant à reconnaître un État palestinien, ils défendent simultanément l’occupation prolongée d’Israël devant la Cour internationale de Justice, arguant qu’Israël est confronté à des “besoins de sécurité très réels” qui justifient son contrôle continu sur les territoires palestiniens.

Qu’est-ce qui pourrait expliquer cette apparente contradiction ?

Le concept de partition a longtemps été utilisé comme un outil politique brutal par les puissances coloniales pour gérer les affaires de leurs colonies, et la Palestine ne faisait pas exception. Le mouvement sioniste a émergé à l’ère du colonialisme européen et a reçu son imprimatur la plus importante de l’Empire britannique. La Déclaration Balfour, publiée par les Britanniques en 1917, appelait à un “foyer national pour le peuple juif” en Palestine sans tenir compte de manière adéquate des Palestiniens qui constituaient une grande majorité dans la région et que Balfour qualifiait simplement de “communautés non juives”. Cette déclaration a ensuite été imposée aux Palestiniens, qui en 1922 étaient devenus des sujets colonisés par la Grande-Bretagne et n’avaient pas été invités à donner leur consentement au partage de leur patrie. Trois décennies plus tard, les Nations Unies ont institutionnalisé la partition avec l’adoption du plan de 1947, qui appelait à diviser la Palestine en deux États indépendants, l’un arabe palestinien et l’autre juif.

Tous les pays voisins de la Palestine au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, qui avaient obtenu leur indépendance de leurs dirigeants coloniaux et rejoint l’ONU, ont voté contre le plan de 1947. Les Palestiniens n’ont pas été officiellement pris en compte lors d’un vote que beaucoup ont considéré comme illégitime ; il a divisé leur pays pour accueillir l’immigration sioniste, à laquelle ils avaient résisté dès le début. L’Organisation de libération de la Palestine, créée plus d’une décennie plus tard, a formalisé cette opposition, en insistant sur le fait que la Palestine telle que définie à l’intérieur des frontières qui existaient pendant le mandat britannique était “une unité territoriale indivisible” ; il a refusé avec force la création d’un État et, à la fin des années 1970, il luttait pour un État laïc et démocratique. Cependant, dans les années 1980, le président de l’OLP, Yasser Arafat, ainsi que la plupart des dirigeants de l’organisation, en étaient venus à accepter que la partition était un choix pragmatique, et de nombreux Palestiniens qui avaient alors été écrasés par la machinerie de l’occupation l’ont accepté. comme moyen de se séparer des colons israéliens et de créer leur propre État.

Il a fallu plus de trois décennies aux Palestiniens pour comprendre que la séparation n’arriverait jamais, que le but de cette politique était de maintenir indéfiniment l’illusion d’une partition dans un avenir lointain. Dans cette zone crépusculaire, la violence expansionniste d’Israël s’est intensifiée et est devenue plus directe, à mesure que les dirigeants israéliens sont devenus plus effrontés dans leur engagement à contrôler totalement le fleuve du Jourdain jusqu’à la mer Méditerranée. Israël s’est également appuyé sur les dirigeants palestiniens discrédités pour maintenir son contrôle – principalement ceux qui dirigent l’Autorité palestinienne et qui collaborent avec les machinations d’Israël et se contentent de bantoustans non souverains et non contigus qui ne remettent jamais en question la domination globale d’Israël. Ce type d’ingénierie démographique, qui implique l’isolement géographique des populations indésirables derrière des murs, est au cœur des régimes d’apartheid. Répéter l’aspiration à deux États et affirmer que la partition reste viable présente Israël comme un État juif et démocratique – distinct de son occupation – lui donnant un vernis d’appétence et obscurcissant la réalité selon laquelle il gouverne plus de non-juifs que de juifs.

Vu sous cet angle, les tentatives ratées de solution à deux États ne sont pas du tout un échec pour Israël mais un succès retentissant, car elles ont renforcé l’emprise d’Israël sur ce territoire alors que les négociations de paix allaient et venaient mais n’ont jamais abouti. Ces dernières années, les organisations internationales et israéliennes de défense des droits de l’homme ont reconnu ce que de nombreux Palestiniens soutiennent depuis longtemps : qu’Israël est l’auteur de l’apartheid. B’Tselem, la principale organisation israélienne de défense des droits de l’homme, a conclu qu’Israël est un régime singulier de suprématie juive du fleuve à la mer.

Aujourd’hui, alors que l’attention internationale est à nouveau centrée sur la région, de nombreux Palestiniens comprennent les dangers d’une discussion sur la partition, même en tant qu’option pragmatique. Beaucoup refusent de ressusciter ce discours politique vide de sens. Dans un message récemment publié de manière anonyme, un groupe de Palestiniens sur le terrain et dans l’ État de la diaspora a écrit : “La partition de la Palestine n’est rien d’autre qu’une légitimation du sionisme, une trahison de notre peuple et l’achèvement final de la Nakba”, ou catastrophe. , qui fait référence à l’expulsion et à la fuite d’environ 750 000 Palestiniens avec la fondation d’Israël. “Notre libération ne peut être obtenue que grâce à une unité de lutte, fondée sur l’unité du peuple et sur l’unité de la terre.”

Pour eux, l’État palestinien que leurs dirigeants incompétents continuent de colporter, même s’il était réalisable, ne parviendrait pas à annuler le fait que les réfugiés palestiniens sont incapables de retourner dans leurs foyers, actuellement en Israël, et que les citoyens palestiniens d’Israël continueraient à résider comme ils le devraient. des citoyens de seconde zone au sein d’un soi-disant État juif.

Les puissances mondiales pourraient choisir d’ignorer ce sentiment, le considérant comme irréaliste, si tant est qu’elles en prennent note. Ils pourraient également choisir d’ignorer le rejet israélien d’une solution à deux États, alors que les dirigeants israéliens abandonnent toute prétention et s’opposent explicitement à toute voie menant à un État palestinien. Pas plus tard qu’en janvier, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré qu’Israël “doit avoir un contrôle de sécurité sur l’ensemble du territoire à l’ouest du Jourdain”. Il a ajouté : “Cela entre en conflit avec l’idée de souveraineté. Que pouvons-nous faire? »

Et pourtant, la solution à deux États continue d’être à l’avant-plan pour les décideurs politiques qui ont recommencé à déformer la réalité d’un régime expansionniste en une prescription politique à laquelle ils peuvent s’accrocher. Ils passent en revue les dispositions selon lesquelles l’État palestinien doit être démilitarisé, qu’Israël maintiendra une surveillance sécuritaire et que tous les États du monde n’ont pas le même niveau de souveraineté. C’est comme si un siècle d’échec, culminant avec le naufrage du processus de paix, se reproduisait au cours des cinq derniers mois.

Ce ne sera pas la première fois que les revendications palestiniennes ne seront pas prises en compte en ce qui concerne leur propre avenir. Mais tous les décideurs politiques devraient tenir compte de la leçon du 7 octobre : il n’y aura ni paix ni justice tant que les Palestiniens seront assujettis derrière les murs et sous la domination israélienne.

Un seul État, du fleuve à la mer, pourrait paraître irréaliste ou fantastique, ou être une recette pour de nouvelles effusions de sang. Mais c’est le seul État qui existe dans le monde réel – et non dans les fantasmes des décideurs politiques. La question est alors : comment peut-on la transformer en une justice ?

Tareq BACONI, The New York Times (traduction automatique). Lu le 02/04/2024, le jour de mon anniversaire.

Lire aussi :
Tareq BACONI, Hamas Contained – The Rise and Pacification of Palestinian Resistance, 2018 [Partage en ligne].
État unique Palestine-Israël, Monde en Question.
Dossier PALESTINE occupée depuis 1948 (avec liens partagés), Monde en Question.
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La solution : un État Palestine-Israël

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“Comment créer et maintenir un État pour un autre peuple dans un pays déjà habité? La quadrature de ce cercle est le dilemme d’Israël depuis sa fondation et la cause de la tragédie palestinienne qui en a résulté.”

Dans ce livre, Ghada Karmi montre que le projet sioniste qui soutient l’existence de l’État d’Israël a toujours été et reste aujourd’hui impraticable. On y trouvera le détail des nombreux projets envisagés pour résoudre le conflit israélo-palestinien, depuis la célèbre – mais jamais appliquée – résolution 242 du Conseil de Sécurité de l’ONU, adoptée après la guerre de 1967. Tous ces projets ont été des échecs, y compris les accords d’Oslo de 1993. Israël a toujours considéré les Palestiniens comme un “non peuple”, et sa position a toujours été appuyée par la grande puissance mondiale, celle des États-Unis.

Restent aujourd’hui trois options :
– celle du statu quo, mal nommée car elle recouvre en réalité la poursuite du processus de dépossession des Palestiniens, la judaïsation rampante de toute la Palestine ;
– celle de la création d’un État palestinien aux côtés d’Israël, qui a la faveur de toutes les organisations internationales, mais qui n’est pas applicable, car le “territoire palestinien” est fait de cantons séparés par les colonies israéliennes, leurs routes de contournement et tous les obstacles faits pour empêcher qu’un véritable État puisse s’établir ;
– celle qui donne son nom au livre : un seul État sur le territoire de la Palestine historique, où les deux peuples vivraient sur un plan d’égalité.

Le principal obstacle est qu’Israël ne veut pas en entendre parler, mais comme Ghada Karmi le fait remarquer, la situation actuelle est déjà celle d’un seul État. Il est organisé et dirigé par Israël, avec trois groupes d’habitants, les Juifs israéliens qui jouissent de tous les droits, les Palestiniens d’Israël qui sont des citoyens de deuxième ordre avec quelques droits mais pas tous, et les Palestiniens des territoires occupés qui n’en ont aucun. Ghada Karmi montre que la seule solution du conflit est celle d’un seul État, où tous les habitants jouiraient des mêmes droits politiques et civiques – solution aujourd’hui impossible mais qui reste la seule souhaitable.

Ghada KARMI Israël-Palestine, la solution : un État, La Fabrique, 2022 [Partage en ligne].

Lire aussi :
Edward W. SAID, La solution : un seul État, Palestine en Question, 10/01/1999.
Edward W. SAID, Israël, Palestine – L’égalité ou rien, La Fabrique, 1999.
Vers un État unique en Palestine-Israël, Palestine en Question, 23/03/2009.
Articles État unique Palestine-Israël, Palestine en Question.
Dossier documentaire Palestine-Israël – Un seul État, Monde en Question.
Dossier documentaire PALESTINE (avec liens partagés), Monde en Question.
Revue de presse PALESTINE, Monde en Question.
Veille informationnelle PALESTINE, Monde en Question.

L’impasse de deux États

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Penser l’actualité, marcher à contre-courant.

 

La seule solution possible est celle qui met fin à l’oppression d’un peuple par un autre et qui garantisse des droits et des devoirs absolument égaux aux deux peuples.

Parler du conflit israélo-palestinien c’est banaliser la dissymétrie entre l’État d’Israël, qui occupe une terre qui n’est pas la sienne, et la résistance désespérée des Palestiniens. Il s’agit bien de la guerre d’un État contre un peuple pour le contraindre à se soumettre à la colonisation. Elle a commencé en 1948 et continue en 2023 après l’épisode particulièrement sanglant de 2009 [1].
Depuis 75 ans, les Palestiniens sont quotidiennement harcelés par les colons protégés par Tsahal et les divers services de sécurité israéliens. Quand les organisations palestiniennes tendent de desserrer l’étau pour que la population puisse survivre, tout le monde se range du côté de l’oppresseur en déniant aux Palestiniens le droit de se révolter. Le terrorisme quotidien de l’État israélien est occulté pour se concentrer exclusivement sur celui épisodique des organisations palestiniennes.

L’État d’Israël est responsable de l’attaque du Hamas, en particulier Benjamin Netanyahu qui a soutenu pendant des années cette organisation au détriment de l’Autorité palestinienne [2].
Les États-Unis ont aussi une lourde responsabilité, partagée avec l’Angleterre et la France qui ont colonisé le Moyen-Orient après la chute de l’Empire ottoman. La SDN, une caverne de brigands selon Lénine, a validé le droit colonial sur celui des peuples à disposer d’eux-mêmes. Les grandes puissances ont favorisé la création de l’État d’Israël en 1948 au détriment des Palestiniens. Elles n’ont jamais tenu leur promesse de la création d’un État palestinien, mais au contraire encouragé Israël à ne pas respecter les diverses résolutions de l’ONU [3].

Parler aujourd’hui de la création d’un État palestinien, alors que l’armée israélienne s’apprête à envahir la bande de Gaza et à massacrer davantage de Palestiniens qu’en 2009, équivaut à mettre une cierge dans une église en espérant un miracle [4]. Qui peut raisonnablement croire que le gouvernement israélien va accepter aujourd’hui ce qu’il a toujours refusé ? Le miracle pourrait venir des Israéliens eux-mêmes qui, dégoutés du gouvernement d’extrême droite de Benjamin Netanyahu, demanderaient la reconnaissance des Palestiniens en échange de la paix, mais il n’existe pas en Israël un homme politique capable de négocier l’indépendance de la Palestine comme le Général de Gaulle l’a fait pour l’Algérie contre ses propres partisans, y compris contre une partie de l’armée.

L’impasse est totale. Tous ceux qui défendent encore la solution à deux États ont une vision obsolète de la Palestine. La réalité sur le terrain montre que ce principe n’est plus réalisable depuis plus de vingt ans.
La bande de Gaza reste un cas à part puisque l’armée israélienne s’est retirée du territoire en 2006 en laissant le Hamas la gérer au quotidien. Israël a reproduit le système des ghettos dans lesquels le Judenrat (Conseil juif) servait d’intermédiaire entre les autorités nazies et la population.
La Cisjordanie fut elle petit à petit fragmentée par l’implantation de colonies reliées entre elles par des routes de contournement, les unes et les autres interdites aux Palestiniens. Ainsi, les villages palestiniens sont devenus des enclaves totalement isolées, dominées par les colonies israéliennes situées presque toujours en hauteur avec un accès prioritaire à l’eau et contrôlées par l’armée [5].

Après la guerre contre Gaza (du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009), certains ont discuté de la nécessité de la cohabitation des Palestiniens et des Israéliens dans le même État. Ziyad Clot, ancien membre de l’équipe de négociateurs de l’OLP lors de la Conférence d’Annapolis en 2007, résumait ainsi cette perspective :

Avec des Palestiniens sans boussole et des Israéliens désormais otages d’un ultranationalisme inquiétant, les tendances lourdes de ce conflit vont perdurer : l’unilatéralisme, l’usage de la force, l’évolution démographique et l’instrumentalisation du religieux resteront les principaux déterminants du problème israélo-palestinien. Au-delà de ces dérives, les différentes communautés israéliennes et palestiniennes, imbriquées les unes aux autres, n’auront pourtant pas d’autre choix que de cohabiter un jour au sein d’un même État. Ce ne sera pas chose aisée et cette perspective peut paraître aujourd’hui très lointaine. Mais elle est inéluctable et salutaire.
20/03/2009, La fin de la solution des deux États, Le Monde, texte introuvable sur le site mais publié par Monde en Question [6].

Cette idée apparemment simple est compliquée car elle remet en cause beaucoup de préjugés sur la conception de l’État-nation qui, depuis le XIXe siècle, a imposé d’enfermer chaque peuple dans un État monoethnique ou monoculturel protégé par des frontières. Toute l’histoire des guerres européennes découle de ce concept, qui fut exporté dans les colonies. Les colonisés ont repris le schéma du nationalisme des colonisateurs. Ainsi, la partition de l’Inde, colonie anglaise, fut le résultat de la politique coloniale qui instrumentalisa et attisa les conflits religieux entre hindous et musulmans pour maintenir sa domination.
La partition de la Palestine a suivi le même processus avec une différence de taille : on a glorifié le nationalisme israélien même quand il utilisa l’arme du terrorisme contre l’Angleterre, mais on a dénié le droit au nationalisme palestinien. Les puissances occidentales soutiennent sans faille le terrorisme de l’État israélien contre les Palestiniens depuis 75 ans ! Or, comme le dit Rachid Khalidi dans The New York Times, “La seule solution possible est celle qui met fin à l’oppression d’un peuple par un autre et qui garantisse des droits et une sécurité absolument égaux aux deux peuples” [7]. J’ai cité sa phrase en exergue de cet article, mais en remplaçant “des droits et une sécurité” par “des droits et des devoirs” car la sécurité dépend de la réciprocité des droits et des devoirs.

14/10/2023
Serge LEFORT
Citoyen du Monde et rédacteur de Palestine en Question

Lire aussi :
Dossier PALESTINE occupée depuis 1948 (avec liens partagés), Monde en Question.
Revue de presse Palestine-Israël, Monde en Question.
Veille informationnelle Palestine, Monde en Question.
Veille informationnelle Israël, Monde en Question.


Notes


[1] Lire : Guerre d’Israël contre le peuple Palestinien, Monde en Question.
Tous les articles d’Info-Palestine doivent être actualisés à la nouvelle adresse du site ou modifiés comme suit :
ancien lien = “https://info-palestine.net/article.php3?id_article=NUMÉRO
nouveau lien = “http://www.info-palestine.eu/spip.php?articleNUMÉRO”.

[2] Lire : 08/10/2023, Pendant des années, Netanyahu a soutenu le Hamas. Aujourd’hui, on en paie le prix, The Times of IsraëlCommentaire, Monde en Question.

[3] Le Monde diplomatique a publié en 2009 une liste de résolutions de l’ONU non respectées par Israël, mais sans dire qu’aucun pays n’a contraint Israël à les respecter.
2009, Résolutions de l’ONU non respectées par Israël, Le Monde diplomatique.

[4] Lire : 14/01/2009, Offensive israélienne contre Gaza : une mise en perspective, Monde en Question.

[5] Lire : Sylvie FOUET, Franck DEBIÉ, La paix en miettes – Israël et Palestine (1993-2000), PUF, 2001. Je remercie chaleureusement l’attachée de presse qui m’a offert ce livre.
De la paix construite par les accords d’Oslo à partir de septembre 1993, il ne reste aujourd’hui que des miettes : la reconnaissance réciproque d’Israël et du peuple palestinien, une Autorité, acteur du système international, qui gère la vie quotidienne de trois millions de Palestiniens, un début d’émancipation économique et un espace réduit de souveraineté. Le principal héritage du « processus de paix » est en effet une Palestine enclavée, constituée d’une centaine de parcelles, compliquée par le développement des colonies et l’enchevêtrement des routes nouvelles qui contournent les villages palestiniens. L’économie, les déplacements, les mentalités se sont adaptés au nouvel ordre administratif et aux contraintes issues des négociations et de la gestion sécuritaire. Depuis sept ans, les ambiguïtés, les blocages, puis les retards des accords de paix au Proche-Orient ont progressivement émietté la logique de paix et rouvert la voie à la violence.
Lire aussi :
– Alain DIECKHOFF, Les espaces d’Israël – Essai sur la stratégie territoriale d’Israël, Sciences Po, 1987.
Compte-rendu : AnnalesPolitique étrangèreVingtième Siècle
Les territoires occupés par Israël en 1967 ont été façonnés par des stratégies et correspondent à un projet politique : une stratégie militaire, pour conjurer la menace armée ; une stratégie démographique permettant d’étoffer la présence humaine juive ; une stratégie utilitaire visant à exploiter au mieux les ressources économiques et à acquérir la maîtrise vitale de l’eau; une stratégie symbolique, plus particulièrement étudiée ici, visant l’enracinement dans les hauts lieux de la mémoire juive.
– Julieta FUENTES-CARRERA, Politiques israéliennes d’aménagement du territoire et nation genèse : quelle lecture géopolitique de la région allant de la Méditerranée au Jourdain ?, Thèse de doctorat en Géopolitique, 2013.
– Julieta FUENTES-CARRERA, Philippe SUBRA, Israël, l’obsession du territoire – Aménagement et géopolitique en Israël et en Cisjordanie (1905-2018), Armand Colin, 2018 [Extrait en ligne].
Compte-rendu : Cahiers de géographie du QuébecConseil québécois d’Études géopolitiquesGéocarrefour
Cet ouvrage analyse le rôle central que joue « l’obsession territoriale » d’Israël dans la construction de l’État-nation, dans l’exclusion spatiale entre Juifs, Arabes israéliens et Palestiniens et dans le façonnement des identités.

[6] Lire aussi :
– 24/07/2018, La solution d’un État unique, La Revue des Ressources.
– 14/10/2023, Dans la guerre Israël-Hamas, la solution à deux États n’est plus possible que sur papier, Le Devoir.
– Dominique VIDAL (sous la direction de), Palestine Israël – Un État, deux États ?, Actes Sud, 2011 .

[7] Lire : 15/10/2023, Rachid KHALIDI, Les États-Unis devraient réfléchir à deux fois aux projets israéliens concernant Gaza, The New York Times (traduction automatique).
J’ai suggéré à l’auteur la modification de sa conclusion et il m’a répondu : “Thanks so much for the kind words.”

Le gouvernement contesté par les Israéliens se venge sur les Palestiniens

Suivre l’actualité, courir après le vent.
Penser l’actualité, marcher à contre-courant.

 

La réaction du gouvernement israélien à l’attaque du Hamas était prévisible. Il fait ce qu’il a toujours fait : infliger une punition collective à la population palestinienne en renforçant le blocus de Gaza. Ainsi, Benjamin Netanyahu a décidé un blocus total, c’est-à-dire l’arrêt de la fourniture de l’eau, du gaz, de l’électricité, de la nourriture et des médicaments. Le message est clair : Qu’ils crèvent !

L’État d’Israël renforce l’ordre coloniale sur les territoires occupés avec les mêmes méthodes que celles du gouvernement français en Algérie. Toutes les anciennes puissances coloniales approuvent la guerre contre les Palestiniens. Les États-Unis envoient des armes à Israël et l’Union européenne bloque l’aide aux réfugiés palestiniens [1]. Or, comme en Algérie, le terrorisme d’État alimente le terrorisme de résistance. Détail qui échappe à tout le monde !

Nous sommes en guerre a martelé plusieurs Benjamin Netanyahu samedi matin. L’im-Monde prétend sans rire que “C’est un contre-emploi, mais Benyamin Nétanyahou est devenu un premier ministre de guerre.” Qu’a fait Benjamin Netanyahu depuis 1996 ? Il a favorisé le Hamas pour affaiblir l’Autorité palestinienne [2].
Les gouvernements israéliens sont en guerre contre les Palestiniens depuis le 14 mai 1948, jour de la création de l’État d’Israël réalisé aux dépens des Palestiniens et avec la complicité des puissances occidentales qui n’ont pas respecté le plan de partage de la Palestine voté le 29 novembre 1947 par l’Organisation des Nations Unies (ONU). L’occupation des territoires palestiniens est toujours considérée comme illégale selon le droit international, mais tout le monde s’en fout !

Il ne faut pas être dupe. L’attaque du Hamas est une aubaine pour Benjamin Netanyahu et son gouvernement d’extrême droite qui est fragilisé par l’opposition massive des Israéliens au projet de réforme judiciaire. De hauts responsables de la police, de l’armée et du Shin Bet ont exprimé publiquement leurs désaccords. Beaucoup de réservistes ont refusé de faire leur période. Depuis des mois, les manifestants campaient à la porte des ministres. Benjamin Netanyahu mobilise car la guerre fait taire les opposants qui rejoignent l’Union sacrée pour défendre la patrie en danger [3].

Tout le monde compatit pour les victimes israéliennes, mais personne pour les victimes palestiniennes !
Tout le monde condamne le terrorisme du Hamas, mais personne le terrorisme de 75 ans d’occupation de la Palestine !
Les Palestiniens sont seuls, désespérément seuls. L’ONU n’a jamais respecté la résolution 181 du 29 novembre 1947. L’UNRWA, créé le 8 décembre 1949, est rapidement devenu une bureaucratie qui défend l’occupation car elle est sa raison d’être. Les gouvernements arabes ont instrumentalisé la cause palestinienne pour leurs intérêts propres. Les directions de la résistance palestinienne ont fait faillite en collaborant avec l’occupant. Les organisation pro-palestiniennes occidentales sont devenues de simples porte-paroles, y compris du Hamas, voire des collaborateurs du Mossad [4].

Personne ne se pose de question sur la vie quotidienne des Gazaouis. La bande de Gaza est un territoire de 365 km² où survivent 2 200 000 Palestiniens (5 500 habitants au km²) dont la majorité sont des réfugiés. La ville de Gaza (45 km²) est plus petite que Rennes (50,39 km²), mais sa population (667 000) est plus de trois fois plus élevée que celle de la capitale bretonne (215  366) [5]. Cette prison à ciel ouvert est entièrement clôturée par une barrière de sécurité. Les entrées et sorties des personnes, des marchandises et des services (eau, gaz, électricité) sont totalement contrôlées par les autorités israéliennes. De fait, Gaza est un camp de concentration israélien… administré par le Hamas depuis 2006. Israël a reproduit le système des ghettos dans lesquels le Judenrat (Conseil juif) servait d’intermédiaire entre les autorités nazies et la population.
Par exemple, les permis de travail en Israël ne sont attribués directement aux travailleurs palestiniens, mais aux responsables du Hamas qui les répartissent selon leurs critères. Toute la vie quotidienne des Gazaouis, imposée de loin par Israël, dépend de leur proximité avec les divers bureaucrates du Hamas et donc de leur allégeance à ces derniers.

Benjamin Netanyahu et son gouvernement veulent éliminer le Hamas de Gaza. Tout le monde applaudit, mais à supposer qu’ils réussissent, ils devront alors administrer directement leur colonie et s’exposer à une confrontation avec les Palestiniens car il naîtra inévitablement une organisation de résistance qui, comme l’Organisation juive de combat du ghetto de Varsovie, réalisera une insurrection des Gazaouis contre l’occupant israélien.

Au risque de déplaire, je conseille vivement la lecture de cet article : Israël a reçu le dernier avertissement, RIA Novosti (traduction automatique).

09/10/2023
Serge LEFORT
Citoyen du Monde et rédacteur de Palestine en Question

Lire aussi :
Dossier PALESTINE occupée depuis 1948 (avec liens partagés), Monde en Question.
Revue de presse Palestine-Israël, Monde en Question.
Veille informationnelle Palestine, Monde en Question.
Veille informationnelle Israël, Monde en Question.


Notes


[1] Il semble que cette mesure de représailles fasse grincer quelques dents, mais l’annonce est significative de l’état d’esprit des dirigeants européens qui ont abandonné les Palestiniens depuis longtemps.
– 10/10/2023, Rétropédalage de l’UE après l’annonce de l’arrêt des aides versées aux Palestiniens, The Times of Israël.
– 09/10/2023, Le soutien militaire unilatéral des États-Unis à Israël alimente les tensions, Global Times (traduction automatique).

[2] Lire :
– 08/10/2023, Scénario connu d’une guerre annoncée, Monde en Question.
– 08/10/2023, Pendant des années, Netanyahu a soutenu le Hamas – Aujourd’hui, on en paie le prix, The Times of Israël.

[3] Lire :
– Revue de presse 2023, Monde en Question.
– Revue de presse 2022, Monde en Question.

[4] Lire :
– 18/03/2011, Le Fatah et le Hamas unis contre les Palestiniens, Monde en Question.
– 20/11/2012, Échec du nationalisme palestinien, Monde en Question.

[5] Note du 13/10/2023 : Merci à la lectrice rennaise dont la remarque m’a permis de préciser les chiffres entre la bande de Gaza et la ville de Gaza.
Lire aussi: Carte de la bande de Gaza, Monde en Question.

La majorité des Israéliens soutient la solution à deux États

Un nouveau sondage publié mardi a révélé que 62% des Israéliens soutenaient la solution à deux États et pensaient qu’il s’agissait de la meilleure option pour l’État israélien, a rapporté le Jerusalem Post.

Le sondage a été mené auprès de 500 personnes issues d’un échantillon représentatif de la population adulte juive par le groupe Smith Research pour l’organisation Blue and White Future.

La recherche montre que 69% des interrogés âgés de 50 ans et plus soutiennent la solution à deux États, par rapport à 63% chez les 30-49 ans et 42% chez les 18-29 ans.

De plus, 25% des 18-29 ans soutiennent l’annexion des territoires palestiniens sans donner aux Palestiniens tous les droits civils, par rapport à 16% des 30-49 ans et 7% des 50 ans et plus.

Quant au facteur de l’âge, l’étude montre que les plus jeunes tendent à adopter des positions plus orientées vers la droite que les adultes.

En réponse aux résultats de l’étude, le coprésident de l’organisation Blue and White Future, Gilad Sher, a déclaré que l’opinion publique israélienne « commençait à internaliser » l’idée de la nécessité d’une solution de deux États.

Il a ajouté que la responsabilité du gouvernement était de pousser dans cette direction, déclarant au Jerusalem Post qu’il était de « l’intérêt national » du pays d’en faire autant.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a soutenu la solution à deux États dans son discours Bar Illan en juin 2009.

20/12/2012
Renmin Ribao

Lire aussi :
• Les Israéliens davantage préoccupés par la pauvreté que par l’Iran, CCIPPP.
Veille informationnelle Palestine, Monde en Question.
Revue de presse Palestine colonisée 2012, Monde en Question.
Dossier documentaire Palestine/Israël – Un seul État, Monde en Question.

Il n'y aura pas d'État Palestinien

Le titre de ce livre peut paraître pessimiste pour toux ceux continuent à militer pour la création d’un État palestinien alors que dans les faits ce processus est dans l’impasse depuis bientôt vingt ans. Après Edward Saïd, Ziyad Clot conclut que l’occupation durant soixante-quatre ans a créé dans les faits un État binational, mais ni le gouvernement d’Israël ni les dirigeants palestiniens en Cisjordanie (Autorité palestinienne) et à Gaza (Hamas), qui collaborent avec l’occupant, n’ont intérêt à le reconnaître pour des raisons différentes mais convergentes.

Il n’y aura pas d’État palestinien, selon l’auteur, parce qu’il n’y a plus de bases géographiques garantissant sa viabilité. Les frontières de 1967, qui privaient déjà le peuple palestinien de la Galilée, d’une grande partie de la bande de Gaza et de territoires rattachés avant cette guerre à la Cisjordanie, ne constituent déjà qu’un minimum à peine vital. Le morcellement continu des terres arabes de Cisjordanie, sous l’effet de la colonisation, de l’occupation par l’armée israélienne d’une bande de terre le long de la frontière jordanienne et d’un mur qui coupe en deux les propriétés agricoles, s’ajoute aux conditions de circulation difficiles du fait des check points.

Il n’y aura pas d’État palestinien, d’après Ziyad Clot, parce que l’actuelle autorité palestinienne n’a ni le pouvoir ni même plus l’autorité morale pour mener à bien les négociations qui pourraient aboutir à sa création. Face à un État israélien militairement surpuissant, soutenu sans faille et sans aucune objectivité par les États-Unis et maîtrisant nombre de canaux d’information internationaux, même si cette situation change rapidement, la Sulta ne fait que gérer l’urgence, au plan des symboles le plus souvent.

Il n’y aura pas d’État palestinien enfin, toujours d’après l’auteur, parce que rares sont les parties qui y ont vraiment intérêt. Jamais Israël et les États-Unis n’accepteront de donner des prérogatives de souveraineté, qui incluent notamment la politique étrangère et la constitution d’une armée, sans que cela ne soit pris par son opinion comme une épée de Damoclès. Cette autorité palestinienne permet juste à l’État hébreu de ne pas intégrer en son sein les millions de Palestiniens tout en empêchant l’émergence d’une autre puissance hostile. Les États arabes environnants, qui tant de fois ont instrumentalisé la cause palestinienne, n’ont aucun intérêt à voir émerger un tel État sur lequel aucun d’entre eux ne pourra avoir la maîtrise totale. On se demande même, à lire la longue série des renoncements de la Sulta, si cette dernière a intérêt à voir émerger cet État qui, démocratique, pourrait faire payer très cher à l’OLP et au Fatah leur corruption et leur éloignement.

Ce sombre tableau ne serait pas complet sans parler d’un acteur du quartet dont les silences sont assourdissants, à savoir l’Union européenne. Cette dernière est la principale pourvoyeuse de fonds de la Sulta mais jamais l’expression de « machin », employée par le général de Gaulle pour la caractériser, n’aura été si porteuse de vérité. Son rôle dans le processus d’Annapolis, à lire l’auteur, se résume à celui d’un ectoplasme sans mains et sans voix, voire d’une sorte d’idiot utile des États-Unis et d’Israël. L’Union européenne condamne sans conséquences la colonisation, la destruction de maisons palestiniennes au mépris des droits les plus élémentaires, ce qui valut aussi pour l’opération Plomb durci. Son indignation à dimension variable suit souvent de près celle des États-Unis ; l’attitude de la France est à peine détachée de cet
ensemble.

Esprit Critique

L’intérêt du témoignage de Ziyad Clot est résumé par Alain Gresh :

Franco-Palestinien ne parlant pas l’arabe, il est recruté par le département de négociations de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Il doit participer au processus de paix lancé par le président George W. Bush à Annapolis en novembre 2007, censé déboucher sur la création d’un État palestinien en 2008. Il se lance à corps perdu dans le travail pour y découvrir, étape par étape, que ces pourparlers ne font que masquer ce qui se passe sur le terrain : colonisation, judaïsation de Jérusalem, checkpoints, arrestations arbitraires, etc.

Les révoltes populaires, qui ont chassé du pouvoir Zine Ben Ali en Tunisie et Hosni Moubarak en Egypte, risquent de déborder en Palestine où la population vit dans la précarité sous la botte de l’occupant israélien et les collabos de l’Autorité palestinienne en Cisjordanie et du Hamas à Gaza [1].

12/02/2011
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Ziyad CLOT, Il n’y aura pas d’État Palestinien – Journal d’un négociateur en Palestine, Max Milo, 2010 [Esprit Critique n°100 p.12 à 14 – EuroPalestineInfo-PalestineLe Monde diplomatique].

« J’ai acheté un billet d’avion El Al. Destination aéroport Ben Gourion. Tel-Aviv. Israël. Il y a 60 ans, ma mère est née à quelques dizaines de kilomètres de là. À Haïfa, en Palestine. »

Ainsi débute le récit du « retour » de Ziyad Clot, petit-fils d’exilés palestiniens. À Ramallah, il accepte un poste de conseiller juridique auprès de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) et devient négociateur, participant aux pourparlers qui devaient mener à la création de l’État palestinien avant la fin de l’année 2008. Mais il se résout rapidement à l’évidence : « Le processus de paix est un spectacle, une farce, qui se joue au détriment de la réconciliation palestinienne, au prix du sang versé à Gaza. Et je suis en train de devenir bien malgré moi un des acteurs de ce drame. »

L’auteur nous plonge au cœur du processus de paix, dévoile les faux-semblants, les manœuvres des parties menées en coulisses et les rivalités internes et internationales qui contribuent à alimenter le fantasme de la solution des deux États. Ce témoignage édifiant, imprégné d’histoire personnelle, montre comment et pourquoi les négociations visant à créer l’État palestinien sont devenues vaines. Pour l’ex-négociateur, une solution pacifique à ce conflit ne peut plus passer que par un État unique au sein duquel Palestiniens et Israéliens devront vivre ensemble. Ce pays hybride, « Israeltine », est d’ailleurs déjà là.

Lire aussi :
• Entretien avec Ziyad Clot : Les Palestiniens n’avaient aucun intérêt à négocier avec Israël, Jeune Afrique, 10/02/2009.
• Entretien avec Ziyad Clot : « Proche Orient : peut-on rêver d’un État palestinien ? », Public Sénat, 16/09/2010.
• Les négociations israélo-palestiniennes, RFI 1/22/2, 18/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : « Point sur les négociations israélo-palestiniennes », Les matins France Culture, 22/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : « Il n’y aura pas d’État Palestinien », RFI, 25/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : « Les négociations israélo-palestiniennes sont une farce », Jeune Afrique, 27/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot, ancien membre de l’équipe de négociateurs de l’OLP, France24, 27/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : « Il n’y aura pas d’État palestinien », OummaPalestine – Solidarité, 10/11/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : « Un État palestinien est-il encore possible ? », Radio Orient, 27/11/2010.
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël – Un seul État, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Résistance à la colonisation de la Palestine, Monde en Question.


[1] Le Hamas et l’OLP répriment toute action de solidarité avec l’Egypte, WSWS, 10/02/2011.

La Question de Palestine

Edward SAÏD, La Question de Palestine, Sindbad – Actes Sud, 2010 [ExtraitsLe Littéraire].

Edward W. Said nous offre une analyse documentée et subtile de l’affrontement, à la fin du XIXe siècle et durant la première moitié du XXe siècle, entre la société palestinienne, occultée par l’idéologie dominante en Europe, et le mouvement sioniste, considéré comme une partie intégrante de l’entreprise coloniale européenne.

Il dresse ensuite un tableau de la Palestine et des Palestiniens avant et après la guerre de 1967, et souligne la cristallisation, face à la discrimination, à l’occupation et à la dispersion, d’une forte conscience nationale incarnée par l’OLP. La dernière partie du livre est consacrée à une étude attentive des accords de Camp David, conclus sous l’égide des Etats-Unis entre Israël et l’Egypte, et de leurs conséquences au Proche-Orient.

L’édition augmentée de 1992 dont nous publions la traduction prend en outre en considération les principaux événements survenus jusqu’alors : l’invasion du Liban en 1982, la première intifada en 1987, la guerre du Golfe en 1991 et le déclenchement du « processus de paix » avec la Conférence de Madrid.

Informer l’opinion américaine et occidentale sur la «réalité du traumatisme collectif national» du peuple palestinien. Permettre la compréhension d’une «situation pas très bien connue et certainement incorrectement appréhendée». Faire prendre conscience que la question de Palestine a été ignorée par les Sionistes et les Américains alors qu’elle constitue une «part concrète et importante de l’histoire». Mettre en lumière le fait que la question juive en Europe chrétienne s’est résolue par la colonisation des terres palestiniennes par les Sionistes, contraignant les Palestiniens musulmans et chrétiens à quitter leur patrie pour devenir des réfugiés. Faire de la question de Palestine «un objet de discussion et de compréhension» afin de la sortir du gouffre de l’Histoire et de l’état d’isolement dans laquelle elle a été confinée.
Tels sont quelques uns des objectifs qui ont incité Edward W. Said à publier, en 1979, La Question de Palestine. Réédité en 1992, cet ouvrage vient d’être publié en langue française aux Éditions Actes Sud.

Lire aussi :
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Résistance Palestine – Edward SAÏD, Monde en Question.